Théorie des groupes/Classes modulo un sous-groupe

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Modèle:Chapitre

Classes à gauche et classes à droite suivant un sous-groupe

Soient (G,) un groupe et H un sous-groupe de G. Le lecteur vérifiera que la relation x1yH est une relation d'équivalence (en x et y) dans G et que les classes d'équivalence correspondantes sont les parties de G de la forme xHx parcourt G. On appelle ces parties de G les classes à gauche (de G) suivant H, ou encore modulo H.

De même, la relation yx1H est une relation d'équivalence dans G et les classes d'équivalence correspondantes sont les parties de G de la forme Hx, où x parcourt G. On appelle ces parties de G les classes à droite (de G) suivant H, ou encore modulo H.

La classe à gauche et la classe à droite suivant H de l'élément neutre sont toutes deux égales à H lui-même. De façon générale, la classe à gauche xH d'un élément x de G est égale à H si et seulement si x appartient à H. Même chose pour la classe à droite.

Il est clair que si G est commutatif, les classes à gauche suivant G sont identiques aux classes à droite. Plus généralement, même si G n’est pas commutatif, il se peut que les classes à gauche suivant un certain sous-groupe H de G soient identiques aux classes à droite. Un tel sous-groupe est dit normal, ou encore distingué, ou encore invariant. On y reviendra plus loin.

Nous noterons G/H l’ensemble des classes à gauche d'un groupe G modulo un sous-groupe H de G (c'est-à-dire : l'ensemble quotient de G par la relation d'équivalence évoquée plus haut)[1].

Indice d'un sous-groupe

Modèle:Wikipédia L'application XX1 est une bijection de l’ensemble des classes à gauche sur l’ensemble des classes à droite, donc l’ensemble des classes à gauche et l’ensemble des classes à droite ont même cardinal. Ce cardinal est appelé l'indice de H dans G et noté (G:H), ou encore [G:H], ou encore |G:H|.

Exemples : l'indice de G dans lui-même est égal à 1 ; l'indice dans G du sous-groupe réduit à l'élément neutre est égal à l’ordre de G.

Toutes les classes à gauche (et toutes les classes à droite) suivant H ont le même cardinal, à savoir l’ordre de H. Comme la somme des cardinaux des classes d'une relation d'équivalence sur un ensemble est le cardinal de cet ensemble, nous avons donc :

|G|=|G:H||H|.

Il en résulte que l’ordre de H divise celui de G, ce qui est banal si G est infini, mais constitue dans le cas fini l'important

Modèle:Théorème

Exemple :

  • Nous verrons plus loin qu’il existe des groupes finis d'ordre premier, dont l'exemple classique est le groupe additif /p, avec p premier. (Il s'agit d'un groupe quotient, dont la définition est donnée plus bas.) En raison du théorème de Lagrange, les seuls sous-groupes possibles de ce groupe sont d'ordre 1 ou p. Autrement dit, ce groupe n'a pas de sous-groupe propre (c'est-à-dire : différent de lui-même) non trivial.

Remarques :

  • Comme noté, les groupes finis sont les seuls groupes pour lesquels le théorème de Lagrange est intéressant. Il peut alors s'énoncer comme suit : soit G un groupe fini et d un nombre naturel. S'il existe un sous-groupe d'ordre d de G, d divise l’ordre de G.

La réciproque du théorème ainsi formulé n’est pas vraie, en ce sens que si d est un diviseur de l’ordre d'un groupe fini, ce groupe n'admet pas forcément de sous-groupe d'ordre d : nous verrons, par exemple, dans les exercices sur le chapitre Groupes alternés que le groupe alterné A4, qui est d'ordre 12, n' a pas de sous-groupe d'ordre 6. Par contre, nous montrerons plus loin que cette réciproque est vraie dans le cas des groupes abéliens. Dans le cas général, nous rencontrerons des réciproques partielles (théorèmes [[../Théorèmes de Sylow#Premier théorème de Sylow|de Cauchy, de Sylow]] et [[../Théorèmes de Schur-Zassenhaus et de Philip Hall#Théorème de Philip Hall|de Hall]], [[../Exercices/Groupes nilpotents#Problème 12 (Ordres des sous-groupes normaux d'un groupe nilpotent fini)|ordres des sous-groupes normaux d'un groupe nilpotent fini]]).

  • La relation
|G|=|G:H||H|

montre aussi que l'indice |G:H| divise |G|.

Modèle:Définition

Au lieu de « transversale à droite » (resp. « transversale à gauche »), nous dirons aussi « transversale droite » (resp. « transversale gauche »).

Modèle:Théorème Démonstration. Démontrons l'existence d'une transversale droite. Désignons par D l'ensemble des classes à droite de H dans G. Ces classes sont non vides, donc, d'après l'axiome du choix, il existe une application f de D dans G qui à toute classe à droite fait correspondre un élément de cette classe. (L'axiome du choix n'est pas nécessaire si l'ensemble D est fini, c'est-à-dire si H est d'indice fini dans G.) On vérifie facilement que l'image de f est une transversale droite de H dans G. (On a simplement adapté à un cas particulier la démonstration de ce théorème de théorie des ensembles : étant donné une partition P d'un ensemble E, il existe une partie de T de E telle que toute classe de la partition P comprenne un et un seul élément de T.)

Modèle:Théorème Démonstration. Choisissons un système de représentants des classes à gauche de G suivant H, c'est-à-dire une famille (xi)iI d'éléments de G telle que, pour toute classe à gauche de G suivant H, il existe un et un seul iI pour lequel xi appartienne à cette classe ; donc |G:H|=Card(I). De même, choisissons une famille (yj)jJ d'éléments de H telle que, pour toute classe à gauche de H suivant K, il existe un et un seul jJ pour lequel yj appartienne à cette classe ; donc |H:K|=Card(J). Prouvons que la famille (xiyj)(i,j)I×J est un système de représentants des classes à gauche de G suivant K.

Soit x un élément de G. Puisque les xi forment un système de représentants des classes à gauche de G suivant H, il existe iI et hH tels que x=xih.

Puisque les yj forment un système de représentants des classes à gauche de H suivant K, il existe jJ et kK tels que h=yjk.

On a alors x=xiyjk, ce qui montre que pour tout élément x de G, il existe un couple (i,j)I×J tel que x soit de la forme x=xiyjk avec kK. Un tel couple est unique, car si (r,s) en est un autre, il existe kK tel que x=xrysk, d'où

(1)xiyjk=xrysk,

d'où tout d’abord (puisque yj,k,ys,k appartiennent à H) xr1xiH, d'où, par hypothèse sur les xi, r=i ; dès lors, (1) donne yjk=ysk avec k,kK : par hypothèse sur les yj, j=s.

Nous avons donc prouvé, comme annoncé, que la famille (xiyj)(i,j)I×J est un système de représentants des classes à gauche de G suivant K. L'indice de K dans G est donc

Card(I×J)=Card(I)×Card(J)=|G:H||H:K|, ce qui démontre l'énoncé.

(Remarque : en prenant pour K dans la formule des indices le sous-groupe réduit à l'élément neutre, nous retrouvons l'égalité |G|=|G:H||H|. Nous aurions donc pu ne pas démontrer cette égalité séparément et la déduire de la formule des indices.)

Sous-groupe d'indice fini d'un groupe de type fini

Cette section peut être omise en première lecture. On y démontre un lemme qui servira à prouver le théorème de Nielsen-Schreier dans un futur chapitre sur les groupes libres. On démontre aussi un théorème (tout sous-groupe d'indice fini d'un groupe de type fini est un groupe de type fini) qui intervient dans une des démonstrations d'un théorème de Schur[2].

Modèle:Définition

Soient H un sous-groupe d'un groupe G et T une transversale droite de H dans G. Pour tout élément g de G, il existe un et un seul élément h de H tel que g soit de la forme ht avec t dans T.

  • Posons p(g)=h. Nous définissons ainsi une application p de G dans H (dépendant évidemment de T). Cette application p est une surjection. En effet, si h est un élément de H, choisissons un élément t de T ; alors h est image par p de l'élément ht de G.
  • Nous poserons aussi g¯=t. De cette façon, g=p(g)g¯ donc p(g)=gg¯1.

Modèle:Théorème Démonstration[3]. Si p désigne la surjection de G sur H que nous avons considérée juste avant l'énoncé, ht,x=p(tx)=tx(tx)1.

Soit h un élément du sous-groupe H. Il s'écrit

h=a1a2an,aveca1,,anXX1.

Posons, pour k=0,1,,n :

tk=a1a2ak.

En particulier, t0=tn=1, donc

h=(t0a1t11)(t1a2t21)(tn1antn1).

Or tk1ak=tk, donc chacune des n parenthèses de ce produit est de la forme

ta(ta)1,avectTetaXX1.

On conclut en remarquant que si tT et a=s1, en posant t=ta, on obtient

ta(ta)1=(tst1)1=(ts(ts)1)1.

Modèle:Théorème Démonstration. Choisissons une transversale droite T de H dans G. Si nous remplaçons dans T l'unique élément de HT par 1, nous obtenons encore une transversale droite de H dans G. Nous pouvons donc supposer que T comprend l'élément 1. D'après le lemme qui précède, l'ensemble A des ht,x, où t parcourt T et où x parcourt X, est une partie génératrice du groupe H. L'application T×XA:(t,x)ht,x est une surjection de T×X sur A, donc

Card(A)Card(T)Card(X).

Comme le cardinal de T est égal à l'indice de H dans G, l'énoncé en résulte.

En particulier :

Modèle:Théorème Remarques. 1° La théorie des groupes libres nous permettra de démontrer l'énoncé plus fort que voici : si G est un groupe admettant une partie génératrice de cardinal fini m, si H est un sous-groupe d'indice fini j de G, alors H admet une partie génératrice de cardinal 1+j(m1). Voir les exercices sur le chapitre Groupes libres : théorème de Nielsen-Schreier.
2° Un sous-groupe d'un groupe de type fini n'est pas forcément de type fini. On en verra un exemple dans les exercices sur le chapitre Groupes libres : théorème de Nielsen-Schreier.

Formule du produit

Modèle:Théorème

Première démonstration. On prouve dans les exercices que

 (1)|H:(HK)|=Card(E),

où E désigne l’ensemble des classes à gauche modulo K contenues dans HK.

HK est réunion disjointe de ces classes, donc |K|Card(E)=Card(HK). Dès lors, en multipliant les deux membres de (1) par |K||HK|, on obtient l'énoncé.

Seconde démonstration. Soit f l’application (x,y)xy de H × K dans HK. Prouvons que pour tout élément z de HK, il y a exactement |HK| éléments (x, y) de H × K tels que f(x, y) = z. Puisque z appartient à HK, il existe a dans H et b dans K tels que z = ab. Prouvons que les éléments (x, y) de H × K tels que f(x, y) = z sont les éléments de la forme (ad, dModèle:Expb), où d parcourt HK. Si (x, y) est tel que f(x, y) = z, alors xy = ab, d'où aModèle:Expx = byModèle:Exp. Si nous désignons par d la valeur commune de aModèle:Expx et de byModèle:Exp, il est clair que d appartient à HK et que x = ad, y = dModèle:Expb. Nous avons donc prouvé que tout élément (x, y) de H × K tel que f(x, y) = z est un élément de la forme (ad, dModèle:Expb), où d appartient HK. Réciproquement, si d appartient à HK, il est clair que (a, d) est un élément de H × K et que f(ad, dModèle:Expb) = ab = z. Nous avons donc prouvé, comme annoncé, que les éléments (x, y) de H × K tels que f(x, y) = z sont les éléments de la forme (ad, dModèle:Expb), où d parcourt HK. Il est clair que si d et d' sont deux éléments distincts de HK, les deux éléments (ad, dModèle:Expb) et (ad', d'Modèle:Expb) de H × K sont distincts, donc les éléments de H × K de la forme (ad, dModèle:Expb), où d parcourt HK, sont en quantité |HK|. Nous avons donc prouvé, comme annoncé, que pour tout élément z de HK, il y a exactement |HK| éléments (x, y) de H × K tels que f(x, y) = z. La formule du produit résulte donc du principe des bergers.

Troisième démonstration. Soit T une transversale à gauche de H ∩ K dans H. Comme |H| = |T|.|H ∩ K|, il suffit de prouver que (i) HK est égal à TK, et que (ii) TK est équipotent au produit cartésien T × K.
(i) Nous avons HK = (T (H ∩ K)) K = T ((H ∩ K) K) = TK
(ii) Pour prouver que TK est équipotent au produit cartésien T × K, il suffit de prouver que la surjection (t,k)tk de T × K sur TK est injective. Soient donc (t,k) et (t',k') deux éléments de T × K tels que tk = t'k'; il suffit de prouver que t = t' (ce qui entraîne évidemment k = k'). Nous avons t'-1 t = k' k-1. Puisque T est contenue dans H, le membre gauche est contenu dans H. Le membre droit est contenu dans K, donc le membre gauche t'-1 t est contenu dans (H ∩ K). Puisque T est une transversale gauche de H ∩ K dans H, on a donc t' = t, comme annoncé.

Notes et références

  1. Cette notation est employée par N. Bourbaki, Algèbre, Paris, 1970, ch. I, § 5, Modèle:Numéro5, p. 56.
  2. J. J. Rotman, An Introduction to the Theory of Groups, Springer, 4Modèle:E éd., tirage de 1999, lemme 7.56, p. 198
  3. Marshall Hall, Jr., The Theory of Groups, AMS, Modèle:2e éd., 1976, lemme 7.2.2 p. 96-97 (à ceci près que Hall appelle classes à gauche nos classes à droite).

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